Eléonore Martin-Menga Judy Phuong Trinh Le et Mitchell Yang

Prix de la persévérance : des lauréates aux parcours inspirants

Partager

Noella Dorothy Beersa (Histoire et civilisation), Wynter Bryant (Arts et culture), Eléonore Martin-Menga (AEC en photographie commerciale) et Judy Phuong Trinh Le (Sciences pures et appliquées) sont les quatre premières étudiantes à recevoir le nouveau Prix de persévérance du Collège Dawson.

Financé par le Fonds pour les initiatives d’enrichissement étudiant, ce prix vise à encourager des étudiant·es de Dawson, tous programmes et secteurs confondus, à poursuivre leurs études.

Le Prix de la persévérance est décerné à une étudiante ou un étudiant de chaque secteur (Arts créatifs et appliqués, Sciences, études médicales et ingénierie, Sciences humaines et administration et Formation continue).

Les quatre étudiantes qui ont remporté le Prix à l’automne 2023 ont dû faire preuve de persévérance et surmonter de grands obstacles. Le Bureau des communications les a rencontrées et livre ici leurs témoignages pour leur rendre hommage et pour inspirer d’autres étudiant·es.

  1. Parlez-nous des obstacles que vous avez dû surmonter pour poursuivre vos études et aller à la conquête de vos rêves, dans la mesure où vous êtes à l’aise d’en parler publiquement.
Eléonore et sa fille
Eléonore et sa fille

Noella Dorothy Beersa : Quand j’étais enfant, ma mère ne m’a pas laissée aller à l’école parce qu’elle avait une vision idéologique du programme qu’elle voulait m’enseigner à la maison. Au secondaire, j’ai enfin pu aller à l’école, et mes résultats scolaires étaient assez bons. Mais pendant cette période, j’ai été placée en famille d’accueil, avec tout ce que ça comporte de difficultés, et je composais avec une forte anxiété (j’ai plus tard reçu un diagnostic de trouble d’anxiété généralisée). Pendant mes études au cégep, je suis devenue majeure et j’ai donc quitté le système pour intégrer un programme d’assistance à la vie autonome. Mon déménagement, mon trouble anxieux, l’apparition de besoins financiers et la solitude constante qui vient du fait de ne pas avoir de famille, en plus de la charge de travail du programme Histoire et civilisation, ça faisait beaucoup à affronter.

Wynter Bryant 
: J’ai dû surmonter la toxicomanie, la dépression et l’anxiété. Avec l’aide de mon réseau de soutien et de mes thérapeutes, j’ai pu continuer mes études et commencer à faire tomber certaines des barrières qui me limitent dans la vie.

Eléonore Martin-Menga : Mon parcours a été semé d’embûches, surtout parce que je suis mère monoparentale. C’est très difficile de concilier les responsabilités parentales et les exigences scolaires. Par contre, le soutien et l’amour de mes enfants sont devenus un moteur plutôt qu’un obstacle. Mes pensées limitantes et les attentes de la société sont une lutte constante, mais avec de la persévérance, j’ai appris à donner la priorité à mes passions et à investir en moi-même.

Judy Phuong Trinh Le : Je vis avec plusieurs handicaps, et j’ai passé beaucoup de temps à l’hôpital depuis plus de dix ans en raison de nombreux problèmes de santé. Je suis atteinte d’hypertension intracrânienne, du syndrome douloureux régional complexe, de polyarthrite rhumatoïde et d’autres conditions comme des problèmes cardiaques et rénaux dus à tous les médicaments puissants et toxiques que j’ai pris au fil du temps pour contrôler la douleur. J’ai subi beaucoup d’interventions et de traitements douloureux, dont une opération qui a mal tourné et qui m’a laissée paralysée pendant six mois. J’ai dû réapprendre à fonctionner, et je suis maintenant en fauteuil roulant.

Même quand j’étais clouée au lit par la douleur, je demandais à ma mère de m’acheter des manuels scolaires, et je me donnais le défi de lire une page par jour. L’apprentissage et l’éducation en général étaient mes sources de bonheur. C’est ce qui me motivait à oublier toutes mes souffrances. J’ai étudié par moi-même, et chaque fois que je terminais un manuel, j’allais dans un centre d’éducation des adultes pour passer l’examen qui me permettrait d’obtenir les crédits. C’est ce que j’ai fait pour toutes les matières de cinquième secondaire, ce qui m’a pris plus de cinq ans. J’étais tellement heureuse quand j’ai enfin obtenu mon diplôme d’études secondaires!

À la session d’automne 2021, j’ai décidé de retourner dans un vrai milieu scolaire pour la première fois en dix ans malgré ma situation. J’ai supporté la douleur et je me suis efforcée de respecter toutes les échéances de mes cours. Malheureusement, mon corps a atteint sa limite après seulement un mois, et j’ai commencé à avoir des crises de panique intenses, ce qui m’a fait manquer trois mois d’école. Pendant cette période, j’avais tellement peur que la moindre sonnerie de téléphone me faisait fondre en larmes. J’avais l’impression que je ne pourrais jamais retourner à l’école ni faire quoi que ce soit de significatif dans ma vie. Mais même pendant cette période sombre, j’ai fait de mon mieux pour étudier un peu chaque jour, et avec le soutien de mes profs et des médicaments supplémentaires, j’ai pu passer mes examens finaux à la fin de la session.

J’ai commencé à avoir espoir en l’avenir, à croire que je pourrais mener une vie qui ait du sens. J’ai développé ma résilience et ma confiance face à l’adversité. Je me suis donné une deuxième chance et suis retournée au cégep après plusieurs mois d’absence. Jusqu’à maintenant, je réussis à tenir le rythme.

  1. Parlez-nous de votre vie à Dawson. Quels sont votre programme et votre profil? Quels sont vos activités, les sports que vous pratiquez et les clubs dont vous faites partie? Qu’est-ce que vous aimez le plus de votre expérience à Dawson jusqu’ici?

Noella : Je suis inscrite au programme Histoire et civilisation, que j’aime beaucoup même si c’est parfois très exigeant. Je fais également partie d’un club non officiel d’apprentissage du latin. Je participe aux soirées de jeux-questionnaires, et j’aimerais qu’elles soient plus fréquentes. J’aime aussi les activités saisonnières, comme la fête de la rentrée. L’une des choses que j’aime le plus dans ma vie à Dawson, c’est la diversité des matières que j’étudie dans le cadre de mon programme. J’ai l’impression d’explorer tout un univers de savoir qui ne me serait pas accessible dans un autre programme.

Wynter : Je suis en Arts et culture. Je n’ai pas d’objectif précis par rapport à mon programme d’études, mais ce que j’aime le plus dans ce programme, et dans mon expérience en général au Collège, c’est d’élargir mes connaissances sur le monde. La recherche du savoir a toujours été très importante pour moi et je consacre beaucoup d’efforts à mes cours.

Eléonore : Je suis inscrite au programme d’AEC en photographie commerciale à Dawson. Comme mes cours ont lieu en soirée, le rythme est plus lent et l’atmosphère est calme. J’apprécie l’ouverture d’esprit du personnel et des autres étudiantes et étudiants, et les locaux sont agréables. Le fait d’être exposée à divers programmes d’arts visuels a éveillé mon intérêt pour des domaines variés comme le design d’intérieur et la peinture. Le soutien dont on profite dans ce programme me permet d’explorer différents aspects de l’art et de la photographie, ce qui m’aide à grandir et à apprendre.

Judy Phuong Trinh Le avec directeur des études Leanne Bennett et le personnel de SAIDE
Judy Phuong Trinh Le avec directeur des études Leanne Bennett et le personnel de SAIDE

Judy : J’étudie en sciences pures et appliquées. Comme je ne peux suivre que deux cours par session, il va me falloir beaucoup de temps pour terminer mon cégep. Je ne peux pas rester assise plus de deux heures à cause des chirurgies que j’ai subies à la colonne vertébrale. De plus, j’ai régulièrement des maux de tête très intenses en raison de mon état neurologique. C’est très difficile pour moi de prendre l’ascenseur, surtout pour monter à un étage supérieur, car la pression augmente dans mon cerveau et aggrave mes maux de tête. Je manque aussi des cours en raison de mes nombreux rendez-vous et traitements à l’hôpital.

Grâce au Service d’aide à l’intégration des étudiantes et étudiants et à mes merveilleux enseignants qui m’aident à enregistrer les cours quand je suis absente, je progresse dans mes études malgré les obstacles. Ce que j’aime le plus dans mon expérience à Dawson jusqu’à maintenant, c’est justement mes profs formidables et les mesures d’adaptation auxquelles j’ai accès! En ce qui concerne les activités, j’ai participé au Space Arduino Navigation Challenge à l’hiver 2023 dans le cadre du cours Engineering Physics, et j’ai tellement aimé l’expérience que j’ai décidé de m’inscrire au club de robotique à la session dernière (automne 2023), et nous participons à la compétition de Robotique CRC.

  1. Qu’est-ce que ce prix vous a apporté?

Noella : Ce prix va améliorer ma stabilité financière pendant mes études universitaires. L’impact est énorme parce que, comme je n’ai pas de famille, c’est une de mes seules sources de soutien financier.

Wynter : Ce prix me donne confiance en moi et m’aide à prendre conscience du chemin que j’ai parcouru dans mon développement personnel.

Eléonore : Le Prix de la persévérance du Collège Dawson a eu un impact énorme sur ma confiance en moi et ma situation financière. Cette reconnaissance de mes grands efforts me donne le sentiment que j’en vaux la peine et me motive à continuer à donner le meilleur de moi-même. Sur le plan financier, il allège le stress qui vient de devoir subvenir aux besoins de ma famille tout en m’adonnant à une passion qui coûte cher. Ça m’a permis d’investir dans des aspects cruciaux de mon entreprise de photographie, comme la planification des sauvegardes, ce qui me donne une méthode de travail sûre et plus professionnelle.

Judy : La question financière est un des plus grands obstacles auxquels je suis confrontée au quotidien, parce que je vis seule avec ma mère et que nous dépendons de l’aide sociale en raison de nos problèmes de santé (ma mère est atteinte d’un cancer). Pour certaines personnes, recevoir 1 000 dollars ne changerait peut-être pas grand-chose, mais pour moi c’est un énorme cadeau qui me motive à poursuivre mes études.

  1. Avez-vous un message d’encouragement à partager avec d’autres étudiantes et étudiants qui vivent une situation difficile?

Noella : Chaque personne peut accéder à la carrière de son choix à condition d’avoir la motivation nécessaire et de trouver les bonnes ressources. Ne laissez pas votre situation financière ou familiale vous dissuader d’aller vers vos rêves.

Wynter : Les seules choses qui m’ont aidée, c’est de faire appel à mon réseau de soutien et d’être honnête – VRAIMENT honnête – au sujet de mes difficultés et de mes émotions. Il faut être prêt à aller en profondeur. Je pense que la seule façon d’aller mieux est de faire face à ses démons, même s’ils sont douloureux ou si c’est gênant. Si vous n’avez pas un bon réseau de soutien, tenez un journal. Je sais que c’est un conseil très répandu, mais ça m’a beaucoup aidée à organiser mes pensées.

Eléonore : Mon message pour les autres étudiantes et étudiants qui vivent des difficultés est simple : continuez à aller de l’avant, même si ce n’est qu’un petit pas à la fois. Confrontez vos pensées négatives et vos croyances limitantes, et rappelez-vous que la persévérance ouvre la porte à un avenir rempli de possibilités illimitées. Cultivez de la gratitude pour la vie que vous avez et croyez que vous méritez un bonheur à l’image de votre personnalité unique. Le parcours peut être difficile, mais chaque pas vers l’avant est un pas vers le succès.

Judy : Beaucoup de gens m’ont conseillé d’interrompre mes études jusqu’à ce que je sois complètement rétablie. Mais quand serai-je complètement rétablie? Et est-ce que ça se produira un jour? Quand j’étais paralysée, j’ai fait de mon mieux pour étudier, un mot à la fois, une ligne à la fois. Je mettais un temps énorme pour apprendre ce que mes amis apprenaient en un seul cours avec l’aide de leurs profs. Une chose est sûre : si j’avais interrompu mes études comme on me le conseillait, je vivrais aujourd’hui une vie plus misérable, faite d’une douleur invalidante et d’une peine constante. Mon conseil est de ne jamais abandonner! Certaines personnes reprennent leurs études à soixante-dix ou même quatre-vingts ans. Trouvez ce qui donne du sens à votre vie et faites tous les jours des petits pas pour avancer vers votre but.

  1. Quels sont vos projets d'études et de carrière ?

Noella : Je veux étudier en littérature anglaise à l’université, puis m’inscrire à la faculté de droit de l’Université McGill pour devenir avocate. Je ne sais pas exactement dans quel domaine du droit je veux travailler, mais je sais que je veux aller à McGill parce que cette université offre un programme qui couvre la common law et le droit civil.

Wynter : Je n’en ai aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que je veux continuer à avoir de bonnes notes pour la prochaine année que je passerai ici. Je m’intéresse à beaucoup de carrières différentes, mais je ne sais pas comment m’y prendre pour avancer vers l’une d’elles. Je n’ai jamais vraiment réfléchi à ce que je ferais si je parvenais à l’âge adulte, alors je n’ai toujours pas de plan de carrière précis. Je vais peut-être continuer en arts ou étudier en environnement.

Eléonore : Au cours de ma dernière année à Dawson, j’ai l’intention d’assimiler au maximum les connaissances transmises par mes enseignantes et enseignants. Parallèlement, je compte développer mon entreprise de portraits et explorer mon côté artistique. J’aspire à passer beaucoup de temps à photographier des gens et des paysages, et à partager avec un public diversifié ce que c’est d’être une femme noire qui aime le plein air.

Judy : Idéalement, j’aimerais terminer mon cégep et poursuivre des études universitaires en informatique et en statistique ou en physique, ou dans un domaine similaire.

  1. Aimeriez-vous ajouter quelque chose?

Noella : Je tiens à dire que le programme Histoire et civilisation est sous-estimé et que, bien qu’il exige beaucoup de travail, c’est une excellente préparation aux études universitaires qui ouvre bien des portes dans des domaines comme le droit. J’aimerais simplement que plus de gens connaissent ce programme et ce qu’il offre.

Wynter : Non. 🙂 

Eléonore : Il n’est jamais trop tard pour investir en soi et vivre ses passions. À 40 ans, je me suis demandé ce que j’aimais et j’ai pris des mesures pour réaliser mes rêves. Mes enfants ne sont pas un obstacle à ces rêves : leur soutien est en fait une force motrice pour moi. Souvent, les contraintes de la vie sont des pensées limitantes plutôt que des facteurs externes comme la situation familiale ou le statut social. Je suis reconnaissante des possibilités que m’offre le Prix de la persévérance du Collège Dawson, et je compte bien en tirer le meilleur parti pour atteindre mes objectifs.

Judy : Ce prix est une immense source de joie, et je suis extrêmement reconnaissante envers l’équipe qui m’a choisie. Merci de m’encourager dans mon parcours d’apprentissage.

Remarque

Le Prix de la persévérance du Collège Dawson est financé par le Fonds pour les initiatives d’enrichissement étudiant de la Fondation Dawson. Pour connaître l’ensemble des lauréates et lauréats de l’automne 2023, visitez la page https://fr.dawsoncollege.qc.ca/awards-scholarships/award-recipients/.



Dernière modification : 25 janvier 2024